EURO ET INFORMATIQUE
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An 2000 : une deadline
Comment se préparer ? Déjà, dans la revue SIC réservéeà la profession comptable, le Conseil supérieur avaitalerté les professionnels de la comptabilité du dangerdu passage à l'an 2000. Cet article intitulé "Leszéros de l'an 2000" qui ne précisait pas quiétait les zéros en question, les sociétésde services qui n'avaient pas prévu le coup, ou les deuxderniers chiffres qui peuvent prêtés à confusionentre les zéros de l'an 1900 et ceux de l'an 2000.
Cet article est rappelé en introduction car, à coupsûr, il conserve son actualité de plus en plusbrûlante actuellement.
Dans une seconde étape, quelques conseils sontdonnés pour éviter d'aller droit au mur lorsque cefameux 1er janvier arrivera.
"2 janvier 2000. D'un geste machinal, il appuya sur la toucheentrée du clavier de son ordinateur. Pas le moindrebruissement, pas le moindre message d'alerte sonore toujoursdésobligeant de la machine, pas le moindre clin d'Ļil del'écran, pas le moindre mouvement significatif du curseurà l'écran qui continuait inlassablement à imiterles feux clignotants d'une voiture. L'ordinateur ne bronchait pas. Ilappuya à nouveau sur la touche entrée sansrésultat. L'ordinateur ne répondait plus.
"Soudain, il comprit qu'il y avait un problème avec leszéros, que les zéros tout seuls ne sont rien pourl'ordinateur. Que le problème ne pouvait survenir que cetteannée puisqu'en 1900 il n'y avait pas encore d'ordinateurs. Etque la technologie informatique qui s'est imposée au 20esiècle, n'avait pas su traiter les deux derniers zérosde l'an 2000. Que ces zéros avaient toute leur significationcette année et que, finalement, ils le laissaientplanté là devant un instrument devenu inutile puisqu'onne pouvait plus entrer ni sortir quoi que ce soit. Il appuyamachinalement par habitude sur la touche entrée, sans espoir.
"Il se souvient des difficultés qu'il avaitrencontrées, il y a quatre ans déjà, en 1996, avec la société de services qui lui avait vendu sonprogiciel de comptabilité, pour faire modifier les longueursde zone des numéros de téléphone du fichierclient, numéros qui étaient passés de 8 à10 chiffres. Que de difficultés pour obtenir les bonnesversions déboguées des progiciels.
"Qu'est-ce que ça va être dans deux ans quand on vapasser à l'euro", pensa-t-il ? Sa société deservices ne lui a même pas dit si elle envisageait de faire lesmodifications nécessaires ou si elle abandonnait lacommercialisation du produit comptable compte tenu del'investissement que représentera la modification. Allait-ilappeler sa société de services ? Il composa le doublezéro et appuya sur la touche entrée. Pas deréaction de l'ordinateur.
"Combien de personnes comme lui vont-elles êtreconfrontées au syndrome de la touche-qui-ne-peut-pas ou plus !Combien de personnes vont-elles alternativement invoquer despuissances surnaturelles ou décliner les bons mots crus dudictionnaire !
"Rien n'y fera. Le programme considère que zéroc'est zéro et que zéro n'est pas une informationrationnelle permettant de passer à la zone de saisie suivante."Ah, si j'avais lu SIC en 1996", murmura-t-il, "j'aurais pu au moinsdire à ma société de services qu'il va y avoirdes problèmes sérieux avec les zéros de l'an2000, qu'il faut s'y prendre à l'avance et intégrer lestravaux d'adaptation dans les plannings du service études,recherches et programmations".
"Finalement, il décrocha son téléphone."
Il faut bien se faire une raison : le 31 décembre 1999 estune deadline au sens anglais c'est-à-dire une date limite quin'admet pas d'être repoussée au lendemain ou ausurlendemain (en tout cas, pas une date limite au sensfrançais).
90 % des logiciels
provoqueront
des perturbations
Plus récemment, le Gartner Group auraitévalué à 90 % le nombre de logiciels qui seraitperturbé par le passage à l'an 2000.
Sans rentrer dans un détail technique qui serait pourtantnécessaire à comprendre pour appréhenderfinalement la difficulté de l'"examen de passage", il fautsimplement retenir à titre d'exemple, que sur PC, uneapplication Windows utilise des fonctions standards qui interrogentle Bios lors du démarrage de l'ordinateur. Pour calculer cettedate, le Bios se repose à son tour sur un circuitélectronique qui gère le temps. Toutefois, 90 % desBios installés sont mal conçus et exploitent desdonnées de façon erronée pour calculerfinalement une date qui va s'avérer fausse : 1900 au lieu de2000 . Les PC plus récents gèrent mieux deproblème mais il convient de s'en assurer.
L'application qui fait référence à la datesystème par l'intermédiaire du Bios peut provoquer deserreurs. S'agit-il vraiment d'une erreur de l'application ?
Un plan de bataille
Comme pour l'euro, il faut préparer un plan d'actionjusqu'au 31 décembre 1999 et ensuite, celui postérieurau 1er janvier de l'an 2000 car personne ne peut être sûrd'être fiable à 100 % dans sa démarche ?
Ces deux plans débouchent sur deux actionsévidemment différentes.
Avant la fin de l'an 1999, il faut, comme dans toutepréparation d'une bataille, recenser les moyens humains etmatériels pour bâtir un plan adapté auxcirconstances du moment et aux objectifs à atteindre. Il fautdonc s'assurer que les logiciels quels qu'ils soient - systèmed'exploitation, Windows, OS, applications, etc. - franchiront bien ladate fatidique. Pour ce faire, il faut, dans un premier temps,simuler sur un poste de travail le passage à l'an 2000(règle n° 1) :
en modifiant la date système, en ouvrant des applications de comptabilité, de paie,d'immobilisations, etc. sur l'an 2000. Dans un second temps, et pour confirmer les tests, il fautdemander aux sociétés de services une attestation deconformité au nouveau millénaire (règle n°2).
Sans aucun doute, des myriades de logiciels de tests de passageà l'an 2000 seront proposées par des éditeursinformatiques ou sur le Web, mais il conviendra de prendre gardeà ne pas se laisser abuser par de telles solutions(règle n° 3) : ce n'est pas la panacée parcequ'il n'est pas possible par exemple de se retourner contrel'éditeur en cas de dysfonctionnement ultérieure del'une ou de plusieurs applications.
Il faut se concentrer sur le test de passage du millénairedu Bios et de la bonne conservation de la donnée aprèsun redémarrage du système (règle n° 4).
Les systèmes
informatiques de
générations anciennes
seront les premières
à provoquer
des dysfonctionnements
Il est vrai que ce sont les systèmes informatiques degénérations assez anciennes qui seront lespremières à provoquer des désagréments :les PC 286, 386 et 486 sont les plus visés ainsi que toutesles applications sous DOS dans le monde PC. Nul doute, que dans ledomaine de la mini-informatique et du mainframe, les applicationsécrites en Cobol par exemple seront les plus sujettes àprovoquer des troubles dans les systèmes informatiques.
Ces opérations doivent être réaliséesnon seulement sur l'ensemble des systèmes informatiques plusou moins autonomes du cabinet mais également il ne faut pasoublier de conseiller la clientèle du cabinet moins avertiedes problèmes qui ne manqueront pas de se poser à elle(règle n° 5).
Toutes ces observations, qui peuvent sembler un peu tropalarmistes, combinées au phénomène del'introduction de l'euro dans l'économie française,n'ont qu'un seul but : faire prendre conscience de l'ampleur desdifficultés à résoudre au plus tôt. Ilvaut mieux changer maintenant de systèmes informatiques oud'applications informatiques que de le faire dans la hâte oudans la précipitation la veille du passage à l'euro ouà l'an 2000.
Certaines sociétés de services ont d'ores etdéjà annoncé la couleur : elles ne feront aucunemodification de leurs logiciels en raison des investissements troplourds qu'il faut engager. Dans ces conditions, le cabinet oul'entreprise aura tout intérêt à changerdès maintenant de systèmes informatiques (règlen° 6). Ceci est également vrai si lasociété de services refusent de délivrerl'attestation demandée. Il faut remarquer que souvent lechangement de version d'un logiciel entraîne le changement dematériel qui le supporte. En conséquence, l'impactfinancier risque de ne pas être négligeable danscertaines situations et confirme, s'il fallait le rappeler, qu'il nefaut jamais être trop en retard sur les évolutionstechnologiques.
Enfin, afin d'éviter les complications inutiles, il estfortement conseiller de ne pas passer à l'euro au cours del'année 2000 ou de l'exercice à cheval sur l'an 2000(règle n° 7). Cette remarque simple d'aspect ne manqued'intérêt dans la mesure où il faut combiner surune période relativement "courte" le passage à l'euroet à l'an 2000.
Chaque cabinet devra s'assurer, de préférence parcourrier, auprès de ses clients que la cause est bienentendue, sa responsabilité pouvant être engagée(règle n° 8).
Il convient de signaler dès à présent quel'an 2000 ne concerne pas uniquement les systèmesinformatiques (règle n°9) mais également tous lesappareils incorporant des dispositifs électroniques : lecteurde cartes magnétiques, horodateur, dispositifs decontrôle ou de sécurité, dispositifs decontrôle de conduite, robotique, alarme, etc.).
Lorsque le 1er janvier 2000 sera franchi, il est possible que lesystème informatique se "plante" pour des raisonsforcément inconnues immédiatement. Le cabinet oul'entreprise doit cependant continuer à "tourner". C'estpourquoi il est prudent de mettre en place des procéduresdégradées de fonctionnement surtout pour lesapplications dites sensibles ou vitales pour l'entreprise (ou lecabinet) : paie, facturation, gestion des stocks, etc. (règlen° 10). Cette mise en place devra toujours apporter laréponse à la question "que dois-je faire si ?". Il seratoujours temps ultérieurement de rechercher lesresponsabilités ailleurs.
Cette interrogation permet de réfléchir sur leproblème de la pérennité de l'entreprise. Ledegré de dépendance des entreprises vis-à-visdes nouvelles technologies est tel qu'il ne serait plus envisageableaujourd'hui de travailler sans équipement informatique. Alorsimaginez une entreprise ou un cabinet au lendemain du 1er janviersans moyens informatiques. Les réviseurs et les auditeurs,légaux ou contractuels, devront sans doute inscrire àtitre préventif dans leurs rapports le doute qui subsistequant au risque de non continuité de l'exploitation(règle n° 11).
Ces prochaines années ne manqueront pas d'inconfort pourles cabinets et les entreprises.
Deux sûretés valent mieux qu'une,
Et le trop en cela ne fut jamais perdu.
QUELQUES REGLES ELEMENTAIRES A RETENIR
- Dans un premier temps, simuler sur un poste de travailisolé le passage à l'an 2000.
- Demander aux sociétés de services une attestationde conformité au nouveau millénaire.
- Ne pas se laisser abuser par les logiciels de tests de passageà l'an 2000.
- Se concentrer sur le test de passage du millénaire duBios et de la bonne conservation de la donnée après unredémarrage du système.
- Conseiller aux entreprises clientes du cabinet moins avertiesdes problèmes qui ne manqueront pas de se poser à elle.
- Changer dès maintenant de systèmes informatiquesdans le cas où aucune modification des logiciels n'estenvisagée en raison des investissements trop lourds.
- Ne pas passer à l'euro au cours de l'année 2000ou de l'exercice à cheval sur l'an 2000.
- S'assurer, de préférence par courrier, auprès de ses entreprises clients que la cause est bienentendue.
- Signaler que l'an 2000 ne concerne pas uniquement lessystèmes informatiques mais également tous lesappareils incorporant des dispositifs électroniques.
- Mettre en place des procédures dégradéesde fonctionnement surtout pour les applications dites sensibles.
- Inscrire à titre préventif dans les rapportsd'audit et de révision le doute qui subsiste quant au risquede non continuité de l'exploitation
Michel LESOURD
Directeur des études informatiques pour la professioninformatique
Conseil supérieur de l'Ordre des experts-comptables
Diplômé d'expertise comptable