Monnaie unique

 

CONSÉQUENCES COMPTABLES

 


 

A - TECHNIQUE COMPTABLE

 

TENUE DES COMPTES

 

La tenue des comptabilités est régie par l'article16 du Code de commerce :

Les documents comptables sont établis en francs et enlangue française.

L'interprétation générale donnée decet article est que les commerçants sont dans l'obligation detenir leur comptabilité en francs jusqu'au 31 décembre2001. Cette interprétation a étéconfirmée par l'Agence Juridique du Trésor (AJT) et parla Chancellerie.

Par ailleurs la Direction Générale des Impôtsa fait savoir qu'elle demanderait que les déclarationsd'impôt (directs et indirects) soient faites en francs jusqu'au31.12.2001. La Chancellerie n'envisage pas pour le moment dechangement de monnaie pour les formalités déclarativesdes entreprises avant la même période.

Certaines entreprises (particulièrement parmi les plusimportantes) souhaiteraient pouvoir tenir leur comptabilité eneuro dès la période intermédiaire (entre le 1erjanvier 1999 et le 31 décembre 2001) et demandent enconséquence que l'article 16 soit amendé dèsmaintenant. Si cette demande était satisfaite, il faudraitmaîtriser le risque de porosité qui pourrait atteindredes entreprises (PME/TPE) qui ne sont pas prêtes ou qui nedésirent pas le basculement.

Une solution pourrait résulter en l'adaptation àl'euro de l'article D 283-1 du décret du 23 mars 1967permettant la présentation des comptes annuels en ECU.

Par ailleurs, il pourrait être envisagé que lessociétés qui en font la demande pourraient tenir leurcomptabilité en euro, sous la condition que leurs rapportsavec les tiers se fassent en francs, sauf accord contraire desparties.

Table des matières

EXERCICES EN CHEVAUCHEMENT

 

Le passage à l'euro le 31 décembre 2001 ne devraitpas poser de problème pour les entreprises dont l'exercicesocial correspond à l'année civile. Le basculementcorrespond alors avec la clôture de l'exercice.

Par contre pour les sociétés pour lesquelles lebasculement interviendra en cours d'exercice, il estnécessaire de fixer la date à laquelle les comptesdevront être convertis. Trois solutions sont envisageables :

- dernier exercice commençant avant le 1erjanvier 2002

Si l'exercice commence tôt en 2001, le risque est que l'euron'ait en début de période que peu de signification pourl'entrepreneur.

- premier exercice commençant à partir du 1erjanvier 2002

Si l'exercice s'achève vers la fin de 2002, les francsauront disparu. Publier alors des comptes ne francs n'aurait que peude signification.

- arrêté intermédiaire au 31 décembre2001

Ceci revient en fait à faire un arrêté completen cours d'exercice. Les difficultés mentionnées plushaut sont résolues, mais au prix de coûtssupplémentaires.

Cas particuliers

- sociétés en premier exercice

Pour des sociétés dont le premier exercice commenceen 2001, devoir tenir les comptes du seul premier exercice en francspour les basculer immédiatement en euro est un exercice quin'a pas de sens et est source de coûts inutiles.

Il serait préférable d'autoriser cessociétés à pouvoir commencer à tenir leurcomptabilité directement en euro;

- sociétés dont l'exercice est supérieurà 12 mois

Si le contribuable n'a dressé aucun bilan au cours del'année, il doit néanmoins établir unedéclaration fiscale au titre de ladite année. Ainsi, sidu fait d'un exercice reporté au delà du 31.12.2001,aucun arrêté de compte n'a eu lieu en 2001, unedéclaration fiscale devra être faite au 31.12.2001.L'entreprise aura alors intérêt à profiter de cetarrêté pour effectuer le basculement en euro àcette date.

Table des matières

B - REGLES D'EVALUATION

 

COMPTES SOCIAUX

 

Dettes et créances en monnaies étrangères

Le Plan comptable général donne les règles devalorisation des dettes et créances en devise à laclôture de l'exercice.

Les actifs et passifs monétaires exprimés en devisesétrangères doivent être convertis en francs audernier cours de change de l'exercice.

- Liquidités et exigibilitésimmédiates :

les écarts de conversion résultant de cettevalorisation sont compris dans le résultat de l'exercice(perte ou gain de change).

- Autres actifs et passifs monétaires exprimés endevises :

- les écarts de conversion sont inscritsà un poste transitoire spécifique du bilan :écart de conversion (actif pour les pertes latentes, passifpour les produits latents),

- les pertes latentes donnent lieu à constitution d'uneprovision pour risques,

- les inscriptions au compte d'écart sont extournéesen début d'exercice suivant.

Application à la monnaie unique

Les parités définitives entre les monnaiesremplacées par l'euro et ce dernier serontarrêtées le 4 janvier 1999 sur une base 31décembre 1998 (fermeture des marchés financiers pendantles fêtes de fin d'année). Rien ne permet d'affirmerà ca jour qu'il y aura identité parfaite entre ledernier cours de 1998 et les parités définitives.

En prenant cette hypothèse, la séquence devraitêtre la suivante :

- conversion au 31 décembre conformémentaux dispositions du PCG,

- conversion au 4 janvier :

- extourne des écrituresprécédentes,

- constatation de la nouvelle valeur des actifs et passifs,exprimés dorénavant en une expression nondécimale de l'euro (DEM, ATS, BEF, NLG...).

Il peut résulter de cette séquence lesinterrogations suivantes :

- le basculement du 4 janvier fait-il partie durésultat de 1998 ou de 1999 ?

- s'il appartient à 1999, est-il un élémentde résultat ou doit-il être imputé sur lescapitaux propres ?

La fixation des parités définitives est unévénement postérieur à la clôturede l'exercice 1998, mais qui a un lien directprépondérant avec une situation existant à laclôture :

- la liste des pays satisfaisant aux conditions deconvergence est connue,

- les éléments pris en compte pour fixer lesparités définitives sont tous de 1998,

- la publication des nouvelles parités en 1999 est dueà des considérations techniques.

Les comptes de 1998 devront donc prendre en compte cette fixationdes parités. techniquement, tous les actifs et passifsexprimés en devises se fondant dans l'euro devront êtrevalorisés à la date de clôture aux tauxfixés pour les parités définitives. Les detteset créances étant désormais certaines quantà leur montant en euro (exprimé dans des montantsdivisionnaires non décimaux), le principe deréalisation s'applique et il n'y a plus lieu d'utiliser descomptes transitoires et des provisions pour risques.

Pour les devises ne rejoignant pas l'euro le traitement àla date de clôture 1998 devra être cohérent lecours à retenir pour déterminer les écarts deconversion et les éventuelles provisions pour risques devraêtre celui de ces devises par rapport à l'euro et connule 4 janvier 1999.

Incidence fiscale :

Fiscalement, les pertes et profits de change latents sont pris encompte dans le résultat fiscal de l'exercice. Parconséquent seuls devraient êtreréintégrés les écarts relatifs au derniercours de l'exercice. Néanmoins une incertitude subsiste quantau traitement et au rattachement fiscal de la différence entrele dernier cours de clôture et les parités fixéesultérieurement. Il ne semble pas que l'enjeu soit important,et si l'Administration acceptait que les réintégrationssoient calculées pour 1998 sur la base des nouvellesparités fixes les travaux d'inventaire seraientfacilités par un traitement identique comptable et fiscal.

Cas des opérations de couverture :

Sous certaines conditions fixées par le Plan comptablegénéral, il est possible de déroger à laconstitution de provision pour risques pour le montant des perteslatentes :

- couverture de change

Il ne devrait plus exister d'opérations en devises sefondant dans l'euro couvertes au delà du 31 décembre1998.

- emprunt affecté à l'acquisition d'immobilisations

La perte latente est couverte par l'appréciation de l'actifcorrespondant, seules les pertes (ou gains) réels sontdégagés à chaque échéance.

La perte, de latente, devient certaine. Il n'y a donc plus lieu dedifférer la charge, et devra être constatée entotalité en 1998.

On peut s'interroger sur la nécessité d'untraitement symétrique au niveau des actifs. Faut-il alors lesréévaluer ? Un tel traitement semble impossible, carcontraire au principe du coût historique et aux conditionsfixées pour une réévaluation. Elle devraitporter sur l'ensemble des immobilisations corporelles etfinancières, et amener les actifs ainsiréévalués à leur valeur actuelle, ce quin'est pas le cas ici.

- position globale de change et termes voisins

De même que dans la première exception (couverture dechange) ce cas ne devrait plus exister au 31 décembre 1998pour les monnaies se fondant dans l'euro.

- emprunt en devises à des conditions plus avantageusesqu'un emprunt en francs.

Les règles de convergence imposés aux Etats pourentrer dans le système de la monnaie unique européennedevraient conduire à une uniformisation des taux sur lesmarchés étrangers et la disparition de cette exception,donc nécessité de comptabiliser en totalité lerésultat au 31 décembre 1998.

- opérations affectant plusieurs exercices.

La possibilité d'étaler les pertes de change qu'aprévue le plan comptable général se fondeprincipalement sur la volatilité et les éventuelsrenversements de tendance d'un exercice sur un autre. Lesparités devenant fixes, cette dérogation n'a plus lieud'être. Dans ce cas également la perte de change doitêtre prise dans sa totalité au 31 décembre 1998.

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C - CONSEQUENCES FINANCIERES

 

COMPTABILISATION DES DEPENSESAFFERENTES AU PASSAGE A L'EURO

 

Le passage à l'euro va conduire les entreprises àengager des dépenses de toute nature. Ces dépensessurviendront tout au long de la période transitoire (1999 -2001), voire avant pour les établissements financiers. Pour lagrosse majorité des PME-TPE, ces dépenses surviendrontplutôt vers la fin de la période transitoire, voire en2002.

La nature de ces dépenses est extrêmementvariée. Schématiquement on peut distinguer :

- dépenses liées à latransformation en euro de l'ensemble des fichiers de l'entreprise

Il s'agit surtout de dépenses informatiques : conversiondes bases de données, remplacement du franc par l'euro dansl'ensemble des traitements informatiques. Les dépensespourront avoir la forme de mise à jour de logiciels existants,d'acquisitions de logiciels spécifiques, voire de mise aurebut de logiciels désormais inutilisables. D'autredépenses peuvent entrer dans cette catégorie :catalogues clients, mise en place d'un double affichage pendant lapériode transitoire et le premier semestre 2002, coûtsdes formalités juridiques (modification des statuts etdépôt au greffe des statuts modifiés).

- dépenses liées aux terminaux de paiement

Sont concernés les changements ou les modifications descaisses enregistreuses, des terminaux de paiementélectronique, des corbeilles de péage d'autoroutes, desdistributeurs de boissons...

- dépenses de formation

Toute entreprise devra nécessairement engager des actionsde formation pour former ses dirigeants et son personnel et lessensibiliser aux problèmes spécifiques à l'euro.

- dépenses de communication, de marketing et dedéveloppement

Ils sont indispensables, pour toute entreprise en contact avec lepublic, pour minimiser les difficultés liées aubasculement.

 

Le traitement comptable de ces dépenses doit se faire selonl'algorithme suivant :

¥ seules les dépenses directement liées àl'euro doivent être prises en compte,

¥ les charges doivent être dissociées desimmobilisations,

¥ les charges de structure doivent être enregistréesau fur et à mesure où elles sont engagées,

¥ les dépenses à caractère exceptionnelpourraient recevoir un traitement comptable spécifique.

1 - Dépenses

Seules des dépenses doivent être prises enconsidération. Tout manque à gagner doit êtreexclus.

2 - Rattachables directement au passage à l'euro

Les dépenses qui n'auraient qu'un lien lâche avec lepassage à l'euro ne doivent pas être prises enconsidération. Ainsi se trouvent exclues toutes lesdépenses afférentes au passage au 3e millénaire.

3 - Distinction entre immobilisations et charges

Le Code de commerce (article D 10) définit ainsi lesimmobilisations :

biens destinés de façon durable àl'activité de l'entreprise. Ils ne se consomment pas aupremier usage

Il est nécessaire d'examiner des dépenses qui serontfaites sur les biens déjà immobilisé, demanière à déterminer si elles pourrontêtre classées en immobilisations ou en charges.

Les dépenses sur éléments déjàexistants ont le caractère de charges d'exploitation si ellesont pour effet de maintenir les éléments d'actif dansun état normal d'utilisation jusqu'à la fin desamortissements. Elles ont le caractère d'immobilisations sielles ont pour effet une augmentation de la valeur d'unélément d'actif ou une augmentation de sa duréeprobable d'utilisation.

Il est fréquemment admis que des dépensesdestinées à répondre aux exigences de laréglementation technique (hygiène,sécurité, environnement), même si ellesn'apportent pas d'augmentation de valeur ou d'accroissement de ladurée d'utilisation, ont le caractère d'immobilisations: sans ces dépenses l'entreprise ne peut pas fonctionner.L'IASC a une position voisine : si ces dépenses sontnécessaires à l'obtention d'avantageséconomiques futurs, elles peuvent êtreimmobilisées.

Donc toute dépense conduisant à la modification d'unactif existant et rendue obligatoire par le passage à l'eurosous peine de mettre en cause la continuité de l'exploitation,est susceptible d'être immobilisée.

4 - Charges de structure

L'entreprise a à supporter un certain nombre de chargesqu'elle ne peut éviter. Dans plusieurs cas, cesdépenses auront un rapport avec l'euro. Ainsi, à titred'exemples :

- frais de formation, dans le cadre de la dotationannuelle, orientés vers l'euro pendant la périodetransitoire de préférence à toute autre action,

- mise à jour périodique des logiciels informatiquespendant la période transitoire, ce qui peut êtrel'occasion pour les éditeurs d'incorporer une nouvellefonctionnalité "euro",

- catalogues clientèle édités annuellement ouà intervalles plus courts.

Ces charges devront être comptabilisées au fur età mesure qu'elles sont engagées car elles sont descharges d'exercice qui auraient dû êtreconstatées, indépendamment du passage à l'euro.

5 - Charges de nature exceptionnelle

Toutes les autres charges qui n'ont pas vocation àêtre enregistrées "au fil de l'eau" doivent doncêtre des charges supplétives exceptionnelles, nonrécurrentes et d'importance significative. Elles pourraientêtre traitées comptablement de diverses manières:

- par anticipation

- constitution d'une provision pour charges

Pour pouvoir être constituée, une telle provisiondoit satisfaire aux conditions suivantes :

. la charge doit être nettementprécisée,

. sa probabilité doit résulterd'événements en cours à la clôture del'exercice.

Ainsi, si pour ces dépenses l'entreprise produit un budgetsuffisamment documenté (nature et calendarisation desdépenses, justification des coûts par des devis) uneprovision pour charges pourrait alors être constituée.

On pourrait retenir comme fait générateur lapublication officielle de la liste des pays adhérant àl'euro. Néanmoins, ceci pourrait poser problème ausecteur des banques et organismes financiers qui sont tenusd'anticiper par rapport à cette date de publication de laliste définitive. L'ardente obligation d'être prêtne doit pas être pénalisante pour ces entités,qui doivent pouvoir appliquer un traitement homogène aveccelui de l'ensemble des acteurs de la vie économique.

- constitution d'une provision pour charges àrépartir

Les conditions fixées pour la constitution de tellesprovisions :

. charges particulièrement importantes parrapport au résultat courant de l'entreprise,

. dont l'engagement de dépenses est différéà une échéance future nettementprécisée,

. et dont le fait générateur est lié àl'utilisation d'une immobilisation donnée.

ne trouvent pas à s'appliquer au problème desdépenses de passage à l'euro (absence de lien avec uneimmobilisation).

- lors de leur survenance

On peut aussi envisager la prise en compte de ces dépensesde la même façon que les frais de structure, au fur età mesure de leur survenance. L'information financièresur ces dépenses pourrait se faire :

- soit dans le compte de résultat,par l'emploi d'un poste spécifique du résultatexceptionnel,

- soit une analyse des coûts de passage dans l'annexe.

- étalement à posteriori de la dépense

Une première solution consiste à inscrire lesdépenses en frais d'établissement. Mais ceci a undouble inconvénient :

- il empêche les possibilités dedistribution,

- il doit être retraité en consolidation.

Trop contraignante, cette solution ne peut pas être retenue.

Une autre solution est l'étalement de la charge. Cettesolution (qui nécessite retraitement dans les comptesconsolidés) serait satisfaisante pour des PME/TPE n'ayant pasd'obligation de consolider. Mais le fait de présenter àl'actif des charges différées dont l'importance estsignificative par rapport aux capitaux propres peut conduire às'interroger sur l'image fidèle donnée par les comptes.

 

* * *

 

Au-delà des contraintes comptables et fiscales que nousvenons d'exposer, il n'en demeure pas moins que le souci qui doitprévaloir à toute solution, est de ne pasdéséquilibrer le fonctionnement des entreprises. Ilserait dommageable que l'ensemble des coûts soit affectéà un seul exercice, ce qui pourrait entraîner desconséquences préjudiciables à l'image desentreprises et à l'économie du pays.

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