Statut juridique de l'euro pendant lapériode transitoire
La continuité des contratsnationaux
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Le Traité de Maastricht n'a pas réglementé le statut juridique de l'euro par rapport aux unités monétaires nationales des États participants à la troisième phase de l'UEM | L'article 2 du projet de règlement sur l'introduction de l'euro (art.109L.4 du Traité CE) stipule que dès le 1er janvier 1999, l'euro devient LA monnaie des États membres participants et qu'un euro sera divisé en 100 cents et l'article 3 ajoute que l'euro remplace la monnaie de chaque État membre participant au taux de conversion. Par ailleurs, l'article 6 (1) de ce texte précise que, pendant la période transitoire, l'euro sera aussi divisé dans les unités monétaires nationales selon les taux de conversion officiels. Le franc devient donc une simple subdivision de l'euro. | 31 décembre 2001 |
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Les opérateurs économiques pourront-ils indifféremment utiliser l'unité euro ou l'unité franc ? | Pour les contrats entrant en vigueur après le 1er janvier 1999, les parties pourront librement désigner l'unité euro comme monnaie de compte ou de paiement. Ils pourront également continuer à utiliser l'unité franc. En dépit de la fongibilité totale entre l'unité euro et les unités monétaires nationales pendant la période de transition, le projet de règlement prévoit des règles d'utilisation précises de ces différentes unités monétaires pendant cette période en matière d'exécution des instruments juridiques (contrats, textes...). Ainsi, tous les actes d'exécution d'un instrument juridique devront utiliser l'unité monétaire exprimée dans ce même instrument (sauf volonté contraire des cocontractants). Exemple : tant que l'article 16 du Code de commerce n'est pas modifié, ce texte impose la tenue de la comptabilité en franc pour les commerçants. Les États ne pourront en principe imposer l'utilisation de l'unité euro en dehors des cas prévus par le règlement (art. 8.4) qu'en conformité avec un calendrier qui serait fixé au niveau communautaire. À titre dérogatoire, et pour les seules opérations de paiement par monnaie scripturale (chèque, virement...) le débiteur pourra payer en unité euro ou en unité monétaire nationale. La somme sera portée au crédit du compte du créancier dans l'unité monétaire de tenue de ce compte. Cette disposition permettra d'effectuer toutes les opérations en unité euro et en franc à partir d'un même compte bancaire. | 31 décembre 2001 |
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Quel sera le pouvoir libératoire de l'euro pendant la période transitoire ? | L'article L109.L.4 du Traité prévoit que le 1er janvier 1999, l'ECU (euro) devient une monnaie à part entière. De même, l'article 2 du projet de règlement sur l'introduction de l'euro (art.109L.4 du traité CE) stipule que le 1er janvier 1999, l'euro devient la monnaie des États membres participants. Par ailleurs, l'article 8.3 du projet de règlement sur l'introduction de l'euro (art.109L.4 du Traité CE) prévoit que le débiteur a la faculté de payer une dette indifféremment en euro ou en franc lorsqu'il utilise la monnaie scripturale. L'euro a donc un pouvoir libératoire dès le 1er janvier 1999. | 1er janvier 1999 / |
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1°) Il conviendra de donner le cours légal aux billets et aux pièces en euro | Le Traité CE le prévoit pour les billets (art.105A). L'article 11 du projet de règlement sur l'introduction de l'euro (art.109L.4 du Traité CE) prévoit le cours légal des pièces en euro. | Dès leur introduction : le 1er janvier 2002 au plus tard. |
2°) Doit-on garder les règles spécifiques du droit français sur la limitation du pouvoir libératoire des pièces pour les paiements entre les particuliers à une certaine somme (Cf., le décret du 22 décembre 1959) ? | Lors de l'introduction des pièces et des billets en euro, l'article 11 du projet de règlement (109L.4 du traité CE) prévoit le principe selon lequel aucune partie ne sera obligée de recevoir plus de 50 pièces en euro dans chaque paiement. Cette règle primera sur les règles nationales contraires. | Dès l'introduction des pièces et des billets en euro. |
Doit on garder les règles spécifiques sur l'obligation fiscale d'utiliser les chèques et les virements pour certaines opérations (Cf. loi du 22 octobre 1940 modifiée et la loi de finances du 29 décembre 1989) ? | Le maintien de ces règles paraît permis par le projet de règlement sur l'introduction de l'euro (considérant 19). En l'absence de mention expresse du franc, ces règles pourront s'appliquer de manière identique pour la monnaie scripturale en euro. | Dès le 1er janvier 1999. |
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1°) Quel sera le régime juridique des pièces et des billets en franc ? | Le projet de règlement communautaire sur l'introduction de l'euro (art.109.L.4 du Traité CE) prévoit que les pièces et les billets en franc resteront soumis au régime monétaire national existant le 31 décembre 1998, sous réserve de sa compatibilité avec le projet de règlement. | 1er janvier 1999 : |
| À compter du 1er janvier 2002, les pièces et les billets en francs conserveront leur cours légal pendant une période de six mois au maximum. Cette période pourra être raccourcie par les législations nationales. Par ailleurs, pendant cette période, les États membres seront compétents pour édicter des règles spécifiques sur l'utilisation des pièces et des billets en francs et pour " aménager " leur cours légal. Lorsque les pièces et les billets en francs perdent leurs cours légal, ils pourront continuer à être échangés auprès des banques centrales nationales pendant une durée de temps fixée au niveau national. | 1er janvier 2002 / 30 juin 2002 au plus tard |
2°) Quel sera le régime juridique de la monnaie scripturale ? | Pendant la période transitoire, la monnaie scripturale reste soumise au régime monétaire national en vigueur le 31 décembre 1998, sous réserve de sa compatibilité avec le projet de règlement sur l'introduction de l'euro (art.109L.4 du Traité CE). À compter du 1er janvier 2002, il n'existe pas de règle précise sur la possibilité de créer la monnaie scripturale en unité franc. Toutefois, à compter de cette date, le franc n'est plus considéré comme une subdivision de l'euro. | 1er janvier 2002 / 30 juin 2002 au plus tard |
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Le passage à la monnaie unique ne doit pas entraîner, en soi, la résiliation ou la modification des contrats en cours | En l'état actuel du droit, la continuité des contrats n'est pas remise en cause en droit français du fait d'un changement monétaire tant pour les contrats privés en application de l'article 1134 du Code civil (note 1) que pour les contrats publics (l'imprévision n'étant pas retenue par le Conseil d'État sur le seul fondement de la dépréciation d'une monnaie), sauf si les parties en ont stipulé autrement dans le contrat. Cependant, afin d'assurer une sécurité juridique complète sur ce point dans l'ensemble des États membres de l'Union européenne, l'article 3 du règlement fixant certaines dispositions relatives à l'introduction de l'euro (art.235 du Traité CE) réaffirme le principe de continuité des contrats. L'article préserve également la volonté contractuelle contraire des parties. |
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Spécificité de certains contrats financiers portant sur la monnaie (ex : les SWAPS de devises) | Les premières études des banques sur ce sujet considèrent que le principe de continuité jouera pleinement pour ces contrats. |
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Spécificité de la modification ou disparition de certains taux variables | Cette question n'a pas été réglée au niveau communautaire. Les solutions devraient être de nature contractuelle. Selon les cas, il conviendra d'introduire des clauses contractuelles spécifiques dans les contrats concernés. Une loi pourrait également être adoptée dans ce domaine. |
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Assurer la conversion en euro de toutes les obligations en écu-panier au taux de 1 pour 1 | Le Traité prévoit cette règle (Cf. l'article 109L.4 du Traité qui précise que le jour du passage à la troisième phase de l'UEM, la valeur externe de l'ECU reste inchangée). L'article 2 du projet de règlement communautaire sur certaines dispositions relatives à l'introduction de l'euro (art.235 du Traité CE) réaffirme cette solution de manière claire. Ce texte, par nature directement invocable devant les juridictions nationales, permettra donc d'assurer l'opposabilité de cette règle. L'article 2 du projet de règlement précité institue également une présomption réfragable (susceptible de preuve contraire) selon laquelle les références à l'écu, sans définition, dans un contrat sont présumées être des références à l'ECU panier officiel. | 1er janvier 1999. |
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1°) L'application du taux de conversion officiel | L'article 4 du règlement fixant certaines dispositions relatives à l'introduction de l'euro (art.235 du Traité CE) prévoit les règles suivantes : 1. le taux de conversion exprime la valeur de l'euro dans une unité monétaire nationale (et pas l'inverse). 2. le taux est exprimé avec six chiffres significatifs 3. le taux de conversion ne doit pas être arrondi ou tronqué lors de la conversion 4. des taux inverses ne peuvent être utilisés pour convertir une unité monétaire nationale en unité euro. 5. les montants devant être convertis d'une unité monétaire nationale d'un État participant dans une autre doivent en premier être convertis en euro et ce montant intermédiaire obtenu ne peut être arrondi à moins de trois décimales. | À compter du 1er janvier 1999. |
2°) La conversion " automatique " en unité euro des montants en unité franc | Le 1er janvier 1999, l'euro remplace le franc dans tous les contrats, cependant les obligations en franc resteront libellées dans cette même unité jusqu'au 31 décembre 2001 (sauf volonté contraire des parties au contrat) et seront donc exécutées dans cette même unité (sauf volonté contraire des parties au contrat). Ce n'est qu'à la fin de la période transitoire (le 1er janvier 2002) que les références au franc seront obligatoirement converties en unité euro au taux officiel. L'article 14 du projet de règlement communautaire sur l'introduction de l'euro (art.109L.4 du Traité CE) prévoit que toutes les références au franc devront être considérées comme des références à l'euro au taux officiel à la fin de la période de transition. Ce texte permet donc d'assurer l'opposabilité de la conversion de toutes les références au franc lors du basculement à l'euro. D'un point de vue juridique, il se suffit en soi et il ne sera pas nécessaire de modifier formellement les contrats. Ces modifications formelles pourraient cependant être nécessaires pour des raisons de clarté. | 1er janvier 2002 |
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3°) À partir de quelle date les parties ne pourront-elles plus conclure de contrats en unité franc ? | Le projet de règlement sur l'introduction de l'euro ne prévoit pas explicitement à quelle date les nouveaux contrats ne pourront pas être conclus en francs. Cependant, à compter du 1er janvier 2002, l'euro est la monnaie des États membres participants et le franc n'est plus considéré comme une subdivision de l'euro. L'utilisation de l'unité franc ne paraît donc plus possible dans les contrats. | 1er janvier 2002 |
| En tout état de cause, cette solution devient certaine lorsque les pièces et les billets en franc auront perdu leur cours légal. | Entre le 1er janvier 2002 et le 30 juin 2002 au plus tard. |
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Question identique à celle des contrats nationaux mais la problématique est différente | Cette question sera réglée par la loi applicable au contrat. Il est donc préférable que le droit applicable au contrat soit le droit de l'un des États de l'Union (plus particulièrement d'un État participant à la troisième phase de l'UEM), et que le juge compétent soit situé dans un État de l'Union européenne (un juge peut écarter l'application d'une loi étrangère dans certains cas). Toutefois, il ne semble pas exister de législation étrangère (d'un pays tiers à l'Union européenne) qui permette la rupture unilatérale du contrat sur le seul fait d'un changement monétaire. La pratique commerciale amène toutefois la plupart des contrats internationaux à prévoir le recours à l'arbitrage. Certaines clauses arbitrales peuvent alors impliquer une certaine souplesse dans l'application du droit. | Pour les contrats internationaux libellés en écu-panier, la question se pose dès le 1er janvier 1999. Pour les contrats libellés en franc, la question se pose en principe lors de la conversion " automatique " de l'ensemble des obligations libellées en unité monétaire nationale : à partir du 1er janvier 2002 (note 3). Insertion, si possible, dès maintenant, tant pour les contrats en cours que pour les contrats futurs d'une clause désignant le droit applicable ainsi que la juridiction compétente. |
| Ces contrats pourraient être assortis d'une clause informative sur le passage à l'euro | L'inclusion de la clause informative " Union monétaire "dans les contrats internationaux libellés en ECU ou dans une devise européenne appelée à être convertie en euro pourrait être envisagée dès maintenant. Sa rédaction, comme son opportunité, restent à préciser en fonction des types de contrats. |
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Assurer la conversion en euro des montants en francs au taux officiel | En principe, le changement de valeur de la monnaie ou de la monnaie elle-même est régi par la loi monétaire (loi de l'État d'émission de la monnaie) et cette loi est universellement opposable (Cf., le considérant n° 8 du projet de règlement fixant certaines dispositions relatives à l'introduction de l'euro pris sur la base de l'article 235 du Traité CE). En l'espèce, la loi monétaire sera le règlement communautaire sur l'introduction de l'euro (art.109L.4 du Traité CE). | Le remplacement du franc par l'euro aura lieu le 1er janvier 1999. Toutefois, et ainsi que pour les contrats nationaux, les contrats resteront libellés en unité franc (sauf volonté contraire des parties) jusqu'au 1er janvier 2002. À cette date, le remplacement automatique des unités francs par l'unité euro aura lieu en application de l'article 14 du projet de règlement sur l'introduction de l'euro. |
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Assurer la conversion de l'écu-panier en euro au taux de 1 pour 1 | Cette continuité est réaffirmée par l'article 2 du projet de règlement sur certaines dispositions concernant l'introduction de l'euro (art.235 du Traité CE). Elle sera donc juridiquement opposable aux juridictions des pays tiers en vertu du principe de " lex monetae ". Une clause d'information sur le passage à l'euro pourrait toutefois accompagner les nouveaux contrats. La sécurité juridique serait également plus grande si le droit applicable est celui d'un État de l'Union. | Dès le 1er janvier 1999. |
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1°) Il faudra s'assurer que les paiements de sommes " arrondies " possèdent un effet libératoire et extinctif | Les arrondis résultant de la conversion seront juridiquement opposables en vertu du règlement communautaire fixant certaines dispositions relatives à l'introduction de l'euro (art.235 du Traité CE). L'article 5 de ce texte pose en effet le principe de l'arrondi au " cent " le plus proche. Si le résultat se situe à mi-chemin, il conviendra d'arrondissage au cent supérieur. NB : lorsque l'ensemble des prix seront convertis dans le seul euro (2002), cette règle d'arrondi n'empêchera pas le commerçant d'ajuster ses prix s'il le désire (principe de la liberté des prix prévue par l'ordonnance du 1er décembre 1986). |
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2°) Les arrondissages, lors des conversions successives franc-euro-franc, n'aboutissent presque jamais à un montant identique en francs. Doit-on considérer que le montant final obtenu est toutefois juridiquement opposable ? | Une loi sera adoptée pour permettre d'opposer juridiquement le montant en unité franc obtenu lors d'une telle conversion successive. Par le passé, des situations similaires ont été réglementées en droit français | Dès le 1er janvier 1999. |
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Il conviendra de rétablir des seuils plus " commodes " (arrondis) après leur conversion en euro | L'article 14 du projet de règlement communautaire sur l'introduction de l'euro impose la conversion en euro de l'ensemble des références en franc : il s'agit donc d'une " loi-cadre " qui se suffit en soi pour assurer le basculement de l'ensemble des seuils existants. Ces textes n'auront pas, d'un point de vue juridique, besoin d'être formellement modifiés. Cependant, les États membres conservent leur compétence pour éventuellement " arrondir " les montants obtenus afin de rétablir leur lisibilité. Le parallélisme des formes implique que les textes modifiant les seuils soient de nature identique aux textes instituant les seuils. | L'adaptation des seuils en euro devrait logiquement pouvoir se faire à compter du 1er janvier 2002. Il n'est en effet pas possible d'avoir simultanément des seuils arrondis en unité euro et en unité franc. |
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Il conviendra de s'assurer de l'existence de sanctions adéquates contre la contrefaçon et la falsification des pièces et des billets en euro | L'article 12 du projet de règlement sur l'introduction de l'euro stipule que cette question relèvera de la compétence nationale. | Les sanctions devront être en vigueur lors de l'introduction des pièces et des billets en euro (fin de la période transitoire). |
(1) " Les conventionslégalement formées tiennent lieu de loi à ceuxqui les ont faites. Elles ne peuvent êtrerévoquées que de leur consentement mutuel, ou pour descauses que la loi autorise. Elles doivent êtreexécutées de bonne foi. " (2) Il s'agit bien évidemment du termegénérique utilisé en droit civil pourdéfinir un lien de droit entre deux ou plusieurs personnes envertu duquel l'une des parties, le créancier, peut contraindrel'autre , le débiteur à exécuter une prestationdonnée. (3) Cette question pourrait toutefois se poserà partir du 1er janvier 1999 lorsque des paiements doiventêtre effectués dans des États tiers àl'Union européenne. Ces paiements ne pourront en principes'effectuer qu'en euro, les unités monétairesnationales n'étant plus des monnaies et n'étant plusà ce titre côté sur le marché des changescontre devises tierces. © Ministère de l'Économie,des Finances et de l'Industrie, 19/11/97