Nouveaux réseaux, nouveaux pouvoirs : pour une Démocratie Renouvelée

Contribution thématique de : Dominique Sciamma (Cergy Pontoise), Laurent Cervoni (Mont Saint Aignan), Astrid Panosyan (Déléguée Nationale) pour le Congrès du Parti Socialiste du Mans (2005)

Plus que jamais, le Parti Socialiste fait aujourd’hui le diagnostic d’une société dangereusement divisée, douloureusement morcelée, profondément inégalitaire. Le délitement est général : crise politique et institutionnelle, crise économique, crise sociale. Jamais depuis la chute du Mur, la gauche n’a pourtant été capable d’articuler un projet à la hauteur du défi que le libéralisme le plus sauvage se targue de relever naturellement. Le 21 avril 2002, puis le 29 mai 2005 sont les derniers symptômes les plus cruels du déphasage croissant entre les Partis Politiques et les citoyens. Désyndicalisation, communautarisme, repli identitaire, tout montre que le tissu social se défait.

A l’origine du hiatus

Dialogue social en panne, chômage structurel, rejet des élites, méfiance à l’égard des élus, tentation de repli sur soi, balancier électoral systématique, incapacité à penser la mondialisation : la société française est aujourd’hui malade. Et c’est la démocratie qui risque de succomber.

Depuis bientôt 25 ans la Gauche se trouve confrontée, aux mêmes questions et aux mêmes problèmes qui ont régulièrement reçu les mêmes réponses, et qui ont généralement échoué, qu’elles aient été proposées à gauche, ou à droite, par des élites formatées et finalement assez homogènes.

Il est donc probable que la majeure partie des problèmes posés à la France est de nature structurelle, mieux même de nature systémique. Car ce n’est pas l’organisation du système qui engendre tel ou tel problème, mais bien le système lui-même.

La mission du parti politique dont la devise a longtemps été de « Changer la Vie » est bien de ne pas se contenter du système en place, et de lui en substituer un autre, plus juste, plus efficace, plus solidaire, en mettant en lumière les insuffisances et les incohérences du système en place.

De façon synthétique, le mal qui ronge la société française, et au-delà, l’ensemble des sociétés développées, trouve son origine dans le hiatus grandissant entre l’organisation sous-jacente réelle de ces sociétés et l’organisation des pouvoirs qui visent à la piloter. Les structures, les pratiques et outils, et les profils de la plupart des élus sont formatés pour un monde qui a disparu : peu complexe, fermé, peu éduqué, fortement hiérarchisé, lourdement industriel, doté d’une importante inertie. Ils ne sont pas adaptés au monde qui s’avance : très complexe, très ouvert, très éduqué, basé sur la conception, volatile et changeant en permanence.

De la pyramide au réseau

L’évolution des sociétés humaines, en particulier dans sa dimension économique et organisationnelle, est déterminée par la genèse, la croissance, et le blocage de « systèmes ». Le passage d’un système à un autre est toujours caractérisé par une crise. La plupart du temps, la crise est surmontée en réinventant un nouveau système. C’est toujours par un saut qualitatif que l’on passe d’un paradigme à un autre. A chaque étape, les productions sont de plus en plus immatérielles, et leur valeur ajoutée de plus en plus grande.

A chacune des étapes du développement des sociétés humaines, celles-ci se sont dotées d’organisation, tant politiques qu’économiques en rapport direct avec la nature des productions, et de la qualité des savoirs des humains impliqués dans ces productions.

On pourrait facilement segmenter ces organisations en 3 familles :

  1. La pyramide : Le système est dirigé par « les Anciens » : possesseurs d’un savoir très peu partagé, un Roi-Arbitre et quelques barons pilotent le système. L’énergie est consommée dans la négociation interne au système. Ceci est d’autant plus facile que les sujets (qu’ils soient salariés, fonctionnaires, ou simple citoyens) sont à la fois peu formés, peu compétents,et conséquemment assez disciplinés, dévoués, fidèles, pour ne pas dire dociles. Le savoir et les compétences personnels sont peu importants, et peu promus puisqu’ils ne sont pas nécessaire pour faire fonctionner le système. Système pyramidal par excellence, il fut typiquement le système à l’œuvre dans le cadre des deux révolutions industrielles, mais il est encore malheureusement opérationnel dans de nombreuses organisations humaines : entreprises, services publics, et les partis politiques eux-mêmes.
  2. L’arbre : Plus rationnelle, l’organisation est divisée en « centre de résultats », chacun doté d’objectifs, de décideurs autonomes, et d’outils de pilotages appropriés. La décentralisation des responsabilités en est une des règles fondatrices, qui induit une organisation arborescente. Les savoirs et savoirs faire sont regroupés dans ces unités autonomes. Si les compétences requises par les acteurs de ce type d’organisation sont plus importantes, ils n’en restent pas moins interchangeables. Plus performante, plus transparente, plus souple, cette organisation est appliquée dans beaucoup d’entreprises, et est à la base de toutes les réformes de décentralisations (heureuses ou malheureuses) tentées en France depuis 1981.
  3. Le réseau : « Dernier cri » en matière d’organisation, l’organisation en réseau est basée sur l’idée que chaque « projet », quelle qu’en soit sa nature, nécessite une organisation propre, qui n’existe que le temps du projet et disparaît ensuite. Presque organique, vivante, ce type d’organisation est basé sur la mise en relation de « processus ». Chaque processus peut être décrit en termes de production et de consommation. Il n’y a plus de hiérarchie dans ce type d’organisation, plus de centre, plus de périphérie. Constituée de processus à la fois autonomes et interdépendants (ce qui est produit par l’un est attendu par l‘autre), une organisation en réseau nécessite une transparence totale, ainsi que des outils de communication et de mesure performants. Les acteurs impliqués dans cette organisation sont par définition autonomes, responsables, fortement éduqués. Leur capacité d’initiative est plus qu’encouragée, elle est nécessaire. Ce modèle doit définir la vision du Parti Socialiste pour la France et pour l’Europe.

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La France Pyramidale

Il est aisé de voir dans quel modèle la France se trouve aujourd’hui coincée.

La lettre, l’organisation, comme les pratiques de la Vème république relèvent pour l’essentiel d’une organisation pyramidale. La situation d’un Roi-Arbitre, entouré de barons, prenant toutes les décisions de manière souvent opaque, et par définition loin des réalités des problèmes qui les motivent, limite la participation des citoyens et leurs représentants. Cet éloignement des citoyens des lieux de prises de décisions a des conséquences évidentes : abstention croissante, résignation voire colère sociale comme le 29 mai, désyndicalisation ou encore rejet du politique.

Si la société française des années 50 – encore fortement agricole, en phase d’industrialisation et peu éduquée – pouvait se satisfaire d’institutions pyramidales avec un fort pouvoir central, il est clair que la France du XXIème siècle – tertiaire, internationalisée, et éduquée – ne peut plus être pilotée « d’en haut » et qu’une nouvelle organisation des pouvoirs s’impose.

Une société réticulée

La France d’aujourd’hui est une société « réticulée », constituée d’un maillage fin d’individus de plus en plus formés et responsables, d’intelligences, de compétences … et de problèmes. Le déplacement de la valeur vers la conception exige en effet de disposer de contributeurs responsables dont la principale activité est de penser, de concevoir, de créer.

Parce que plus éduqués, la demande de participation des Français à la prise de décision est pressante. Les processus de création de richesse nécessitent une articulation différente avec les acteurs politiques. L’intégration internationale de la France appelle à une coordination choisie et transparente des niveaux de pouvoirs, du niveau municipal à l’Europe.

Le seul moyen de faire face à la complexité d’une telle société en réseau est donc de se doter de structures et de modes de fonctionnement politiques organisés sur le même modèle.

La droite qui gouverne pour la catégorie de la population la plus nantie en réduisant les impôts et en bloquant les investissements publics, ne se soucie pas d’une société en réseau, forcement égalitaire. Si on ajoute que dans la culture française la capitalisation du savoir est une source de pouvoir, une organisation pyramidale ne peut que s’inquiéter d’une évolution vers une structure maillée. La suppression de toutes les structures qui assurent le pouvoir des groupes dominants est une des essences même du socialisme.

les Institutions :

Il semble impossible de tenir le raisonnement précédent en gardant les mêmes institutions, et surtout les mêmes pratiques du pouvoir. Il faut donc repenser nos pratiques du pouvoir et en tirer les conséquences sur les institutions.

La structure pyramidale de nos institutions est la première cause du fossé gigantesque entre les élus et les citoyens. Lorsque les décisions sont prises par des élus irresponsables politiquement (et le Président de la République le premier), les citoyens se sentent légitimement exclus des processus de décision. Si nous sommes indubitablement en république, nous sommes loin d’être une démocratie.

Mais la perversion du système n’atteint pas que ses « élites » ! Bercés dans cette idée d’une toute puissance du sommet, les citoyens eux-mêmes sont naturellement portés à se tourner vers le haut dès qu’un problème surgit, qu’il soit réel ou fantasmé, petit ou grand, public ou communautaire. A force de se l’entendre dire, le citoyen de base ne jure que par l’Etat, et se décharge ainsi sur lui de sa propre responsabilité dans la résolution des problèmes, ce qui est à la fois confortable, et dangereux.

Il faut donc ramener chacun à ses responsabilités, en rapprochant les élus (qui ne doivent plus être des élites, forcément consubstantielles de la pyramide) des niveaux où les problèmes se posent, et les citoyens des cercles enfin ouverts où se discutent et se résolvent les problèmes de la collectivité.

Quelques décisions simples, mais courageuses, doivent être prises :

1 – En finir avec le cumul des mandats :

  • Interdiction de tout cumul de mandats parallèles
  • Interdiction de plus de 2 mandats du même type consécutifs dans le temps
  • Obligation de la part de l’élu de rendre compte de sa mission par des rapports annuels par exemple
  • Mise en place d’un statut de l’élu, afin de permettre l’engagement comme le désengagement post-mandat dans des conditions économiques dignes.

Le nombre des élus va ainsi mécaniquement augmenter, ainsi que le nombre de citoyens impliqués dans la vie politique. Il en découle aussi une implication à 100% sur un mandat unique, gage d‘efficacité. La limitation des mandats dans le temps assure aussi le renouvellement des élus, gage de la bonne représentativité de ces derniers. Le statut de l’élu permet de sortir du syndrome de la professionnalisation de la fonction politique, qui est souvent à l’origine de la déconnexion de responsables politiques de la réalité de leurs mandants.

2 – Réorganiser les pouvoirs :

  • Dé-présidentialiser définitivement le régime, en faisant du Premier Ministre le seul pilote de la politique gouvernementale, responsable politiquement devant le parlement et le peuple.
  • Redonner un rôle central au parlement, qui cesserait d’être une simple chambre d’enregistrement, pour être un acteur central de la vie démocratique française.
  • Redéfinir les justes niveaux d’organisation territoriale : Europe, Etat, Région, Communauté de commune, communes
  • Mettre en œuvre de manière systématique le principe de subsidiarité : les problèmes doivent être résolus au niveau pertinent le plus bas possible, et les moyens nécessaires à la leur résolution doivent être aussi affectés au niveau pertinent. Ce n’est qu’à cette condition que la distance entre le citoyen et les élus et organisations en charge de la résolution de leur problèmes sera mécaniquement réduite.
  • Des organisations par projet doivent être systématiquement mis en place. Elles doivent impliquer élus, associations et simples citoyens, leur durée de vie est liée à la résolution d’un problème et au suivi de la mise en place de la solution. On pourrait reprendre ici le terme de « démocratie participative » tellement galvaudé qu’il a perdu tout son sens. Nous lui préférons le terme de « démocratie interactive » dans la mesure où tous les acteurs sont égaux devant les défis et la recherche de solutions, qu’ils soient élus ou simple citoyen.

3 – Retisser le maillage social

Tissus social, réseau social, il s’agit encore et toujours de maillage. Il y a une urgence à retricoter notre modèle.
Deux pistes existent :

  • Renforcer le tissus associatif : Il existe en France 1 650 000 associations représentants 20 millions de français de plus 14 ans. En 25 ans, leur nombre a été multiplié par plus de 5. Si les associations n’ont pas à se substituer aux élus, elles couvrent cependant un périmètre exhaustif ou presque de la population, des catégories socio-professionnelles, des activités sportives, culturelles. Elles ont donc un rôle clé à jouer dans une démocratie en réseau. Il faut donc inventer et institutionnaliser l’intégration des associations aux processus de prises de décisions dans la cité.
  • Renforcer la démocratie d’entreprise : si les entreprises ne sont pas des démocraties, elles n’en sont pas moins le premier lieu de mise en œuvre des relations humaines. Il est donc impossible d’imaginer une démocratie réinventée en excluant l’entreprise de son champ. Puisque l’entreprise est le premier lieu de mise d’expérimentation de l’organisation par projet en réseau, il faut que le dialogue social en entreprise profite systématiquement de sa mise en œuvre. Que ce soit en termes d’information, de consultation, de prise de décisions, l’ensemble des outils et infrastructures existent pour le mettre en œuvre. Ils doivent induire de nouveaux comportement, et de nouveaux droits.

Les infrastructures et les outils :

Les pratiques en réseau ne sont aujourd’hui possibles que parce que de nouveaux outils sont maintenant disponibles. A bien des égards, la révolution des technologies de l’Information, née il y a plus de 60 ans maintenant, représente un saut qualitatif aussi important pour l’histoire humaine que l’invention de l’écriture. Elle vient remettre en cause les organisations humaines en place et nous obligent à les réinventer. Impossible en effet de vivre dans une société bâtie autour de l’écriture jusque dans ses pratiques du pouvoirs (le texte), alors que les Technologies Numériques de Communication (TNC) nous invitent à passer à une autre dimension, et donc à une autre pratique plus interactive (l’hyper-texte).

1 – Les TNC au coeur de la société en réseau :

Dans nos sociétés développées – et bientôt partout dans le monde – aucun produit ou service n’est et ne sera conçu puis offert sans la mise en œuvre de logiciels tournant sur des ordinateurs, au travers de réseaux de communication informatiques.

Dans ces mêmes sociétés, toute décision- que ce soit dans le domaine de l’entreprise privée comme dans celui de l’action publique – n’est et ne sera prise sans qu’elle n’ait été préparée sur la base d’informations ou d’analyses produites au travers de systèmes d’information.

Partout bientôt dans le monde, le savoir sous toutes ses formes – sciences, cultures, arts, littérature – sera lui-même créé, stocké, accédé, croisé, depuis n’importe quel point du monde.

Cette révolution doit évidemment impacter tout projet politique. Impossible en effet d’imaginer piloter une société à ce point innervée par les TNC sans en intégrer à la fois toutes les opportunités et les possibilité induites.

A ce titre, il faut que les élus ou les responsables politiques maîtrisent ces modes de travail collaboratif où, faisant partie du réseau, ils peuvent interpeller ou être interpellés à tout instant. Tout représentant du peuple ou du gouvernement doit ainsi être actif sur le réseau au travers, par exemple d’outils de communication tels que blogs, sites internet, où agenda, actions, projets, et vision politique sont accessibles à tous.

Ces obligations de communication sont un premier pas vers la mise en place d’un modèle collaboratif et interactif. Une formation obligatoire des élus et des membres du gouvernement pourrait ainsi être retenue.

2. Réaffirmer le rôle de la puissance publique :

On confond trop souvent la notion de réseau avec Internet. Pour beaucoup, utiliser un réseau de communication informatique revient à utiliser Internet. Cette approche inexacte et l’absence d’une démarche volontariste dans le domaine des infrastructures de communication a conduit à des erreurs de la part de tous les gouvernements successifs.

L’enjeu d’une communication entre tous exige une vision ambitieuse en matière de facilitation et fluidification des échanges. Les phénomènes émergents de publication spontanés, ou d’échanges ouverts (peer to peer) par exemple, démontrent les contre-pouvoirs que permettent ces outils de communication.

Cependant, de même que l’accès à l’énergie ou à l’eau est un droit (et le Parti Socialiste aura aussi à agir dans ces domaines), la possibilité d’accéder à un réseau de communication numérique doit aussi être un droit.

Le rôle du Parti Socialiste est donc de revenir sur la tendance actuelle en matière d’infrastructures, qui laisse le marché décider des utilisateurs potentiels du haut débit. Les politiques infrastructurelles, à défaut des infrastructures elles-mêmes, doivent être sous le contrôle de la collectivité alors que les services (dont l’accès à Internet, par exemple) relèvent du seul domaine de la concurrence.

De même que les infrastructures routières dépendent de la puissance publique, les infrastructures numériques doivent relever de la volonté publique, afin de ne pas dépendre d’une stratégie ou d’une seule logique de marché, souvent limitées au respect d’objectifs de rentabilité à court terme. Seule la puissance publique est donc à même de faire l’effort d’investissement nécessaire pour créer ces infrastructures répondant aux enjeux de la société de l’Intelligence. Si les services relèvent bien du secteur marchand, concurrentiel par essence, les fameuses « Autoroutes de l’Information » doivent en revanche être mises à la disposition de tous par la puissance publique.

Ainsi, ce choix stratégique passe, par exemple, par la renationalisation de la partie infrastructurelle de France Télécom ou par des modèles de Délégation de Services Publics, à l échelon adéquat, mais dont la vision et les objectifs sont nationaux ou mieux, Européens.

La faculté d’accéder à tous les services publics, comme les impôts, ou les délibérations en direct du dernier conseil municipal doit être libre et gratuit. La confusion entre réseaux et Internet conduit à considérer que si une information est disponible sur Internet, elle est gratuite et accessible à tous. Or, l’accès à Internet étant contrôlé par un abonnement privé, il n’y a pas d’égalité dans la mise en réseau des informations publiques, les plus faibles étant systématiquement maintenus à l’écart de cette forme de réseau (par l’argent ou le savoir). Les réseaux publics, à l’image de Renater pour la recherche, doivent donc être généralisés, étendus aux structures associatives, écoles primaires, comités d’entreprises, syndicats et à terme l’ensemble des particuliers.

3. Intégrer le réseau dans les missions de régulation de la puissance publique

Dans un marché mondial, le réseau est à la fois une arme au service des puissances économiques et une opportunité pour la démocratie. De même que les pratiques financières doivent être soumises au contrôle d’un régulateur publique, le réseau, doit aussi y être soumis. Une telle organisation redonne aux Politiques et aux citoyens des atouts voire des leviers contre des organisations économiques qui savent exploiter le caractère planétaire,et donc aujourd’hui dérégulé, des marchés.

Cette régulation n’est d’ailleurs pas par définition le seul apanage de la puissance publique, mais de tous les citoyens, puisque le réseau est lui même l’outil et le lieu de sa régulation. Les contrepouvoirs économiques qu’il offre permettent de définir de nouveaux modes de contrôle, mais aussi de productions et de distribution, ouverts à tous, par exemple, dans le domaine de la culture ou de la santé. Ainsi, plutôt que de taxer uniformément des échanges de fichiers (pour protéger les auteurs, notamment), de nouveaux services publics culturels ou éducatifs, par exemple, servirait l’image d’un Parti Socialiste innovant.

4 – Pour une Politique Numérique Commune

La mise en place de réseaux à un niveau local s’intègre ainsi dans le cadre d’une vision nationale et surtout européenne. La création d’infrastructures européennes numériques à Très Haut Débit en fibre optique tient de la même ambition : la mutualisation des coûts, la cohérence des protocoles et des infrastructures, entraîne une baisse automatique des frais des équipements et de maintenance, et permet l’émergence de nouveaux services à des coûts accessibles pour tous, engendrant par surcroît de nouveaux emplois. Ainsi pourra s’instaurer un cercle vertueux au service de la culture, la santé, l’éducation et l’économie, dont aucune catégorie de la population ne sera exclue.

Il faut donc, de manière volontaire, et au niveau européen, initier immédiatement un très vaste chantier d’infrastructures normalisées à très très haut débit. Leur capillarité doit être la plus fine possible, idéalement jusqu’au moindre foyer, car il ne s’agit pas de donner plus à certains, mais bien d’impliquer tous les citoyens.

A chaque époque ses défis : la Politique Agricole Commune a permis en son temps à une Europe volontariste de remodeler et de moderniser complètement sa filière agro-alimentaire. Mais Il n’est plus possible que la seule grande politique européenne soit la politique agricole commune qui consomme plus de 40% du budget de l’Europe. Cette Politique Numérique Commune, dont Lisbonne a esquissé les contours, est seule en mesure de faire entrer de plain pied l’Europe dans la société de l’Intelligence, c’est à dire non seulement de lui offrir les perspectives d’un développement économique durable – cocktail vertueux de valeur ajoutée et d’emplois très qualifiés – mais surtout de consolider en le modernisant son modèle social, où, plus que jamais, l’implication active de ses citoyens sera nécessaire.

Lancer un vaste programme à l’échelle européenne de formation généralisée aux nouvelles technologies et au travail en réseau, systématiquement transnational, constitue un autre défi, afin de diffuser la culture et la pratique du travail en réseau. Ceci nécessite évidemment un investissement massif, au niveau national comme européen, dans l’éducation (et particulièrement vers les universités) ainsi que dans la recherche.

 Repenser la démocratie

Face à la complexité d’un monde ouvert et définitivement globalisé, seule une organisation en réseau permet aujourd’hui d’appréhender et de gouverner les sociétés modernes. Il faut donc repenser les organisations et les pratiques du pouvoir en conséquence : l’organisation en réseau, souple, transparente, responsabilisante, est la seule réponse possible aux défis d’une société mondiale complexe et rapidement changeante.

Seule une organisation en réseau est à même d’impliquer tous les acteurs, politiques comme citoyens, au plus près des problèmes, là où ils se posent.

Seule, elle a la souplesse nécessaire pour s’adapter en permanence aux changements de plus en plus rapides de nos sociétés développées.

Seule, elle propose le meilleur rendement démocratique, comme économique. Seule, elle propose une méthode à même de marier la puissance des individus qui s’affirment, à l’efficacité de l’organisation collective solidaire.

Seul le Parti Socialiste peut en être le porteur.