BDelirium Tremens

ou « Insee rien, mais il dira tout »

La Bande-dessinée c’est …. super !

Comment çà, c’est super ? Après tous ces articles que je me tue à écrire à la lueur d’une bougie mourante, c’est tout ce que vous trouvez à dire sur un sujet qui mérite, et de loin, de figurer au bac ! Mais un sujet comme celui-là, Monsieur, c’est une montagne qui ne peut et ne doit pas engendrer des avis de la taille d’une souris. Tournons nous vers la rue, lieu de l’ultime vérité en ces temps statistiques, et interrogeons en les porteurs inconscients, riches en leurs diversité.

le Collectionneur : La BD c’est ma passion ! J’en ai plus de 12000 chez moi ! Des premières éditions de « Tintin chez les Soviets » jusqu’à l’intégrale de « Roudoudou et Marisette chez les Grozibous » en Bantou, je les ai tous ! C’est moi l’heureux propriétaire du fameux morceau du mur de Berlin sur lequel Jean Frappat avait organisé son dernier Tac-o-Tac avec toute l’équipe de Charlie-Hebdo. Tout mon fric y passe, j’en ai amassé pour une fortune ! Ils sont rangés et classés dans une pièce à l’épreuve du feu ! Comment ? les lire !?! Non mais t’es fou non ! Ca les abimerait !!!!

l’Intellectuel : La Bande Dessinée est dans son rapport sémiotique à l’autre doublement cryptique. Car l’autre c’est autant le lecteur que le lu lui-même, dans ces personnages qui ne s’animent que caressés du regard signifiant du lecteur. L’auteur n’est alors qu’un entremetteur du sens pervers, où le plan (de la page) tente de se faire plan (de communication) et où, malgré les stéréotypes du genre, tente de s’exprimer, dans ses aplats qui miment le volume, la prométhéenne tentative de faire émerger l’En-Soi des ses représentations chétives.

l’A côté de la plaque : Ah ouais la BD ! Oui, j’connais ! Des fois je pique les illustrés de mon fils ! Ce que je préfère c’est les histoires du groom là, euh, Tintin … et son hamster, Snoopy, ouais c’est ça ! Et les machins là avec leurs bonnets blancs, les schproutz ! Ah ce qu’y me font marrer ! Tu parles si je connais !

le Pirandellien : La bande dessinée est un théâtre de marionnettes. Et qui, croyez vous, en est le Stromboli et le véritable maître ? Les histoires surgiraient de la rencontre heureuse d’une feuille de Canson et d’un peu d’encre de Chine, pensez-vous ? C’est effectivement de cette illusion que se nourrit l’auteur de nos aventures, nous les personnages, comme vous dites d’un trait. Bien au contraire, c’est nous qui guidons la plume de l’artiste sur les vierges territoires de papier. Nous qui attendons, invisibles dans la blancheur, qu’un mégalomane convaincu de dominer le monde parce qu’il en trace les représentations, nous habille d’un peu de noir, qui devient alors pour nous la couleur de la vie.

L’Erudit : Après 35 ans de recherche fastidieuses, je peux enfin le révéler : tout a commencé en 1907 (Juillet) dans un quotidien de Nouvelle-Angleterre. Le directeur du journal, un original, avait embauché le seul analphabète du quartier, un dénommé Doug Mc Flynn, comme éditorialiste, grâce auquel il espérait donner un ton nouveau à ses éditions du soir. « Puisqu’il ne sait pas écrire, qu’il dessine donc » s’était-il écrié en ce soir historique. Il semble donc que loin de mener à l’analphabétisme, la BD en vienne, tout simplement.

 

Le Technicien : La BD ? Tout se joue aujourd’hui dans le choix des pinceaux et des plumes. Mon conseil sans hésiter ? Du Duplummeau en poil de rat castrat du Canada pour les pinceaux et des Yotsonoro d’acier trempé dans la chair de veau nourri à la bière modèle 34 à 67 pour les plumes. En ce qui concerne l’encre de Chine, mon choix va directement sur la marque « By Foot« , à base de salive exoderme de seiches de l’océan indien. Et Pour les histoires dites-vous ? Aucun intérêt mon vieux !

Psychanalytique : La Bande dessinée ? Cela se lit comme un rêve non ? Tout ces personnages prisonniers de leurs cases (les ukases de l’auteur) ne sont-ils pas les interprètes d’un drame qui se joue en dehors de la page, chez les lecteur qui s’abandonnent (comme les amants le font) à l’identification fictionnesque ? Ces bandes dessinées ne sont-elles pas d’abord ces « bans de destinées » rêvées que se prêtent les acteurs de la situation, lecteurs et auteurs réunis dans une rassurante famille de papier ? Et ces acteurs-auteurs ne sont-ils pas finalement à la recherche d’un souffle libérateur que seules semblent leur apporter ces fameuses bulles, défiant elles-aussi  la pesanteur (pourquoi elles-aussi), et portant miraculeusement en leur sein le début et la fin de tous nos problèmes : le Langage.

La Concierge : la BD ?!? Non mais soyez poli ! …. Comment c’est pas un gros mot ? Ah la Bande dessinée !! Oui, oui, oui … Les pti’ mickés là avec des bulles partout que je sais jamais dans quelle sens ça se lit comme celles que le fils du cinquième achète avec les sous des commissions mais vous pensez bien que j’avais bien vu son petit manège mais que sa mère elle voit rien. Y paraîtrait que ça leur tuerai l’intellect ces BD comme vous dites. Enfin, comme je dis toujours, vaut mieux qu’y lisent ces imbécillités plutôt que de coincer la bulle.

Le Politique : La Bande-Dessinée, comme le rock, a aujourd’hui acquis droit de cité dans la cité. Et je me félicite que mon parti ait toujours su appuyer, dans les usines, les communes, les villes et les régions tous les efforts en vue de la diffusion de ce média moderne. Je voudrais simplement mettre en garde nos jeunes, et vous me permettrez d’utiliser à cette fin la tribune que vous mettez à ma disposition, de ne pas laisser de côté le livre, qui est la brique de notre civilisation, le porteur de nos valeurs et idéaux. Je me  permettrai donc de leur rappeler que Brayard Editeur vient juste de publier mon dernier essai politique intitulé : « le temps des queues de cerises« , en vente dans toutes les épiceries.

L’amateur : La bande dessinée ? C’est super…..

Bon, Euh ….Et bien, il semble que l’on ait fait le tour de la question. Mais que je ne vous y reprenne pas à dire des banalités.

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